John

Quel plaisir de me trouver projeté dans une rue de la banlieue de Londres qui ressemble tant à mon quartier d’origine. Autre plaisir de me trouver 30 ans en arrière devant la Palme d’Or de Cannes 1996 « Secrets et Mensonges » du même réalisateur Mike Leigh. Les thèmes si chers au réalisateur sont à nouveau présents, les secrets refoulés, les blessures apparentes ou dissimulées, l’infinie solitude de ses personnages. Dans un silence étouffant l’incommunicabilité pose sa chape de plomb dans la famille de Pansy. Le tout est renforcé dans ce nouveau film par un quasi huis clos. Mike Leigh vient du monde du théâtre et maîtrise parfaitement ses outils, notamment la catharsis. Une montée de pression qui s’inscrit sur un fond de banalité, la vie de tous les jours avec ses corvées et puis d’un seul coup, on prend en pleine figure une remise en cause existentielle de ses personnages. Je pense à la scène du cimetière, le repas de famille (déjà vu en 1996) le bouquet de fleurs. C’est cet agencement du trivial et du « vital » qui nous frappe. Comédie ou drame ? Chacun fera sa lecture et pourra par ailleurs choisir son propre dénouement, Mike Leigh nous ouvre des portes mais reste interrogatif.

On ne peut pas parler du film sans évoquer des clins d’œil sociologiques voir anthropologiques. Le racisme est sous-jacent dès les premiers échanges, les problèmes du système éducatif et médical sont exposés, l’ascenseur social de plus en plus grippé, l’accès à des soins psychiatriques visiblement peu accessible. Ce sont les vérités cruelles que je vous encourage à découvrir dans ce beau film, avec des acteurs sublimes et une bande-son discrète mais efficace.